HM GALIMIDI | LE VOILE AU TRAVAIL
16341
post-template-default,single,single-post,postid-16341,single-format-standard,ajax_fade,page_not_loaded,,side_area_uncovered_from_content,qode-child-theme-ver-1.0.0,qode-theme-ver-9.1.3,wpb-js-composer js-comp-ver-4.11.2.1,vc_responsive
 

LE VOILE AU TRAVAIL

qode interactive strata

18 Avr LE VOILE AU TRAVAIL

La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) vient de se pencher sur la licéité des licenciements de deux salariées pour refus d’ôter leur foulard islamique.

La Cour a mis au centre des débats les « règles internes » c’est-à-dire les mentions du règlement intérieur de l’entreprise relatives à la laïcité.

La Cour résume ainsi ses deux arrêts :

« Une règle interne d’une entreprise interdisant le port visible de tout signe politique, philosophique ou religieux ne constitue pas une discrimination directe.

Cependant, en l’absence d’une telle règle, la volonté d’un employeur de tenir compte des souhaits du client de ne plus voir ses services assurés par une travailleuse portant un foulard islamique ne saurait être considérée comme une exigence professionnelle de nature à écarter l’existence d’une discrimination. »

Le premier cas concernait le licenciement d’une réceptionniste prononcé par une entreprise dont le règlement intérieur interdisait les signes religieux visibles

La CJUE a admis qu’une entreprise justifie l’interdiction du voile pour une réceptionniste par son activité de réception et d’accueil car son règlement intérieur prévoyait : « il est interdit aux travailleurs de porter sur le lieu de travail des signes visibles de leurs convictions politiques, philosophiques ou religieuses ou d’accomplir tout rite qui en découle ».

La CJUE indique que :

– « l’interdiction du port visible de signes de convictions politiques, philosophiques ou religieuses est apte à assurer la bonne application d’une politique de neutralité, à condition que cette politique soit véritablement poursuivie de manière cohérente et systématique »,  

– «  la volonté d’un employeur d’afficher une image de neutralité vis-à-vis de ses clients tant publics que privés est légitime, notamment lorsque seuls sont impliqués les travailleurs qui entrent en contact avec les clients ».

– mais qu’« une telle interdiction est susceptible de constituer une discrimination indirecte s’il est établi que l’obligation en apparence neutre qu’elle prévoit entraîne, en fait, un désavantage particulier pour les personnes adhérant à une religion», si  par exemple elle ne visait que le voile et pas tous les signes religieux.

Concernant l’autre salariée, la CJUE demande aux tribunaux :

– de vérifier si le licenciement a été « fondé sur le non-respect d’une règle interne prohibant le port visible de signes de convictions politiques, philosophiques ou religieuses. »

– si tel est le cas,  de vérifier si  « la différence de traitement, découlant d’une règle interne d’apparence neutre risquant d’aboutir, en fait, à un désavantage particulier pour certaines personnes, est objectivement justifiée par la poursuite d’une politique de neutralité et si elle est appropriée et nécessaire »

– et en l’absence de règle interne, de vérifier si cette exigence liée à la religion peut constituer une exigence professionnelle essentielle et déterminante, ajoutant que ce sera rarement le cas car « la volonté de l’employeur de tenir compte des souhaits particuliers du client » n’est qu’une « considération subjective ».

On voit que le 2ème licenciement est plus problématique car la CJUE ne sait pas si l’entreprise avait un règlement intérieur interdisant les signes religieux visibles. Par ailleurs, l’établissement d’un règlement intérieur n’est obligatoire qu’à partir de 20 salariés.

Ajoutons que les voiles et colliers (quel que soit le symbole religieux accroché) peuvent être interdits pour de simples  motifs de sécurité (travail à la chaîne, risque d’être arrachés par des enfants ou des malades, etc.)

L’Arrêt du 25 juin 2014 de la Cour de Cassation dans l’affaire Baby-Loup visait d’ailleurs déjà le règlement intérieur :

– « le règlement intérieur de l’association Baby Loup … disposait que « le principe de la liberté de conscience et de religion de chacun des membres du personnel ne peut faire obstacle au respect des principes de laïcité et de neutralité qui s’appliquent dans l’exercice de l’ensemble des activités développées, tant dans les locaux de la crèche ou ses annexes qu’en accompagnement extérieur des enfants confiés à la crèche »,

– « la cour d’appel a pu en déduire, appréciant de manière concrète les conditions de fonctionnement d’une association de dimension réduite, employant seulement dix huit salariés, qui étaient ou pouvaient être en relation directe avec les enfants et leurs parents, que la restriction à la liberté de manifester sa religion édictée par le règlement intérieur ne présentait pas un caractère général, mais était suffisamment précise, justifiée par la nature des tâches accomplies par les salariés de l’association et proportionnée au but recherché. »

RÉFÉRENCES :

 

LOIS :

– Article L. 1121-1 du code du travail : « Nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionné au but recherché »

– Article L. 1321-3 du code du travail : le règlement intérieur ne peut contenir de « dispositions apportant aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives des restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché».

JURISPRUDENCE :

– Arrêt du 25 juin 2014, n° 13-28.369 de l’Assemblée plénière de la Cour de cassation française (affaire Baby-Loup)

– Arrêts du 14 mars 2017 de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), aff. C-157/15 et C-188/15

http://curia.europa.eu/jcms/upload/docs/application/pdf/2017-03/cp170030fr.pdf

.

No Comments

Post A Comment