HM GALIMIDI | LE DIVORCE SANS JUGE
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LE DIVORCE SANS JUGE

14 Avr LE DIVORCE SANS JUGE

De son vrai nom « divorce par consentement mutuel par acte sous signature privée contresigné par avocats, déposé au rang des minutes d’un notaire », il est plus connu comme « le divorce amiable notarié à 50 euros ».

Depuis le 1er janvier 2017, on ne dit plus « jugement » mais « convention » de divorce amiable car la loi du 18 novembre 2016 dite de modernisation de la justice du XXIe siècle a supprimé l’audience devant le juge aux affaires familiales pour les divorce amiables (c’est-à-dire quand les époux ont réussi à se mettre d’accord sur toutes les conditions du divorce) sauf dans deux cas :

Les époux doivent encore divorcer à l’amiable devant le juge

  • si un des époux est par exemple sous tutelle,
  • ou si un enfant mineur veut être entendu.

Va-t-il dénoncer au juge des violences qu’il aurait caché à l’autre parent et refuser le droit de visite ou exiger d’habiter chez un parent qui ne veut pas sa garde ?

Il faudra donc maintenant essayer de faire signer aux enfants un formulaire indiquant s’ils veulent ou non être entendus par un juge.

 

Quels seront les avantages et les inconvénients de ce nouveau divorce

Un plus, la réduction probable de la durée du divorce :

Car un rendez-vous chez un notaire sera probablement plus rapide à obtenir qu’une audience devant le juge aux affaires familiales, qui peut se faire attendre plus de six mois dans certains tribunaux surchargés.

Les incertitudes :
– Le coût:

2 avocats seront nécessaires au lieu d’un seul pour les deux époux comme il était possible dans l’ancienne procédure, et le document à signer est beaucoup plus long et complexe,

50 € annoncés de frais de notaire pour le dépôt de l’acte au lieu de 16 € de frais de dépôt au tribunal.

Le notaire n’est censé vérifier que la forme du document (délai de réflexion de 15 jours, mentions légales, formulaire d’information des enfants mineurs) et non le fond.

Or les notaires ont déjà prévenu qu’il ne fallait pas y compter car leur déontologie leur impose de signaler tout problème d’ordre public et de légalité fiscale, et ils voudront vérifier, avant de déposer l’acte dans leurs archives,  que les époux n’ont pas changé d’avis depuis la signature chez l’avocat ou… ne sont pas morts depuis, et pour 50€, ils ne vont peut-être même pas enregistrer auprès du fisc les divorces sans biens immobiliers et délivrer des copies authentiques de l’acte.

– Les risques de contestation de l’acte

En effet, le Juge aux affaires Familiales, grâce à son expérience des conflits qu’il a à trancher, contrôlait les actes, faisait rectifier les erreurs, réparer les oublis, ajouter des précisions… et refusait purement et simplement les accords ne garantissant pas les droits des enfants ou d’un des époux.

Or, les notaires, qui ne sont même pas censés lire les dispositions du contrat, n’ont pour la plupart aucune pratique de la garde alternée, du droit de visite …

En outre, s’agissant non plus d’un « jugement » mais d’un « contrat », ce dernier pourrait être contesté en justice par un des ex époux,  un enfant d’un autre lit d’un époux décédé ou un créancier d’un époux…

On peut imaginer :

  • une action en annulation du divorce pour erreur, tromperie, violence (pression économique d’un époux sur l’autre par exemple,  qui pourra être alléguée chaque fois qu’un des époux ne travaille pas)
  • une action en révision ou résolution du contrat de divorce pour imprévision (survenance d’un changement imprévisible rendant l’exécution du contrat trop onéreuse) en cas de chômage par exemple.

Au pire, en cas d’annulation, un époux qui se sera remarié pourra se retrouver bigame  dix ans après le divorce en raison des délais de prescription de toutes ces actions…

Il n’est donc pas du tout sûr que l’économie par suppression de juges escomptée par l’état soit au rendez-vous.

Des problèmes à l’international :

Enfin, le moindre élément d’extranéité (un des époux non français, des époux vivant à l’étranger) compliquera la tâche des professionnels du droit :

Quelle sera alors la valeur d’un « contrat » de divorce dans les pays qui ne reconnaissent que les « jugements » de divorce ?

RÉFÉRENCES :

Loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle, art 50, publiée au JORF n°0269 du 19 novembre 2016

Décret n° 2016-1907 du 28 décembre 2016 relatif au divorce prévu à l’article 229-1 du code civil et à diverses dispositions en matière successorale, titre I, publié au JORF n°0302 du 29 décembre 2016

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